mercredi 24 juin 2009

Un long dimanche de montagne

Le sommet de 5 050 mètres atteint au Parc Sajama nous a donné des ailes et un peu de folie. Nous avons donc décidé, avec Marie et Manu, nos nouveaux compagnons de grimpaille, de nous attaquer au Huayna Potosi, un sommet enneigé à 6 088 mètres...

L'ascension de cette montagne se fait en deux jours au départ de La Paz, avec l'aide de deux guides pour les non initiés que nous sommes.

En seulement deux heures de taxi sur des pistes pierreuses, nous arrivons sur un des flancs du Huayna Potosi, à 4 700 mètres d'altitude, point de départ de notre ascension. Après un bon déjeuner, nous partons rejoindre le refuge alto à 5 100 mètres.

Nous portons chacun quinze kilos sur le dos, car l'équipement que nous devons emmener est très lourd : duvets pour dormir à moins cinq degrés, polaires, manteau et pantalon de ski, chaussures de haute montagne (équivalentes à des chaussures de ski), sans oublier les crampons, le piolet et l'eau !

Nous marchons très lentement pour mesurer notre effort.

A cette altitude, nous avons dejà 40% d'oxygène en moins. Nous prenons donc le temps de regarder le paysage autour de nous qui est d'ailleurs plutôt splendide.

Pour corser le tout, le chemin se tranforme vite en cascade de pierres à gravir. Avec quinze kilos sur le dos, notre équilibre est un peu troublé et nous nous concentrons pour ne pas tomber en arrière !

Après deux heures de grimpette, nous sommes récompensés en découvrant les premières neiges au pied du refuge. Nous nous débarrassons de nos sacs avec bonheur. Un petit bain de soleil à l'abri du vent est le bienvenu pour nous reposer.

Repos écourté pour Flo qui souhaite tester la marche dans la neige avec les crampons et le piolet pour pouvoir rentrer dans le vif du sujet dès la nuit suivante. Pas moins de deux guides l'accompagnent dans ses premiers pas pour le moins hésitants.

Une bonne nouvelle, les crampons accrochent bien la neige ! La mauvaise est que trois kilos aux pieds, c'est très fatiguant à mouvoir !

Une fois le soleil disparu derrière les montagnes, le froid a alors envahi tout l'espace, y compris celui de refuge.
Dix-huit heures, il est temps de dîner...

...et rejoindre nos duvets pour dormir quelques heures avant le départ prévu à une heure trente du matin ! (et oui, nous avons appris que l'ascension des sommets enneigés se fait toujours de nuit, aux heures où il fait le plus froid, car la neige accroche mieux sous les crampons et le risque d'avalanche est le plus faible.)

La nuit est mauvaise pour tout le monde. Pauses pipi malvenues, froid, mal de l'altitude ou stress du défi à venir, les raisons sont nombreuses ! Nous n'avons donc finalement aucune difficulté à nous lever à minuit et demi.

Après un maté de coca, Marie et Manu sont en pleine forme pour démarrer.

De notre côté, malgré le Diamox prescrit et distribué par le docteur Marie, nous nous disons qu'avec notre mal de ventre nous n'irons pas bien loin !

Une heure trente est nécessaire pour se préparer. A deux heures, les crampons sont chaussés, et c'est parti. Nous gravissons lentement la montagne à la lueur de la frontale. Chaque couple est encordé avec son guide, les filles au milieu. C'est donc le guide qui donne le rythme. Un rythme incroyablement lent car l'effort est gigantesque. Chaque pas nous essoufle. Notre guide, Felix, ralentit quand il sent la corde se raidir, cela veut dire que nous ne tenons plus son rythme.

Nous marchons concentrés sur nos pas afin de rester cramponnés à la neige glacée. Concentrés également sur nos ventres qui nous brûlent. Par chance, nous n'avons pas mal à la tête et comme le vent ne s'est pas levé, nous ne souffrons pas du froid. Durant la première heure, nous nous répétons maintes fois que nous ne tiendrons jamais. Il faut six heures pour arriver en haut ! C'est vraiment trop dur. Et pourtant nous avancons encore, un pied devant l'autre. Flo veut au moins voir le lever de soleil, Olive ne veut pas renoncer aussi vite.

Nous nous faisons petit à petit distancer par les autres groupes. Mais nous avancons toujours un pied devant l'autre. Felix a le sourire aux lèvres. Rien ne semble l'épuiser. Lorsque parfois, nous relevons la tête, nous apercevons les petites lueurs des frontales des autres fous. Elle sont si hautes qu'elles se confondent avec les étoiles dans le ciel. 5 500 mètres. Un pied devant l'autre. Nous reprenons notre souffle, parfois pliés en deux par nos brûlures aux ventres. Nous apercevons les lumières de La Paz. Parfois à gauche, parfois à droite. Un pied devant l'autre, nous avancons, les montées n'en finissent jamais. La nuit noire ne veut pas partir. Ce sont probablement les heures les plus longues que nous n'avons jamais vécu. 5 700 mètres. Le soleil n'est pas encore là, nous continuons.

Nous ne nous parlons plus, cela nous demande trop d'effort. Nous mangeons et buvons à peine, car nos ventres ne le supportent pas. Et pourtant nous avons bien besoin de calories ! Flo baille et s'endort presque à chaque pause lorsqu'elle a retrouvé sa respiration. Que c'est dur. Un pied devant l'autre. Ouf, une partie plate. Nous reprenons notre respiration. Soudainement, la nuit noire laisse apparaître une magnifique ligne rose. L'aube est là et devant nous se dresse le sommet du Huayna Potosi, deux cent mètres plus haut.

Il n'en faut pas plus pour nous dire que nous pouvons continuer. Nous sommes si près. Un pied devant l'autre. Nous pouvons à présent marcher sans frontale, le décor autour de nous est grandiose et irréel.

Mais la pente reprend vite et l'effort est toujours aussi difficile.

Les pauses sont de plus en plus fréquentes et nous cherchons de plus en plus notre souffle. Nous avons à présent 60% d'oxygène en moins. Notre ventre nous brûle toujours et il est vide. La pente se raidit. Felix nous dit que nous sommes bientôt arrivés. Nous savons que ses estimations sont plutôt loin de la vérité. Qu'importe cela nous encourage à monter. Le soleil se lève derrière nous. Nous sommes accrochés à la paroi, à bout de souffle. Mille fois nous pensons arrêter et mille fois nous reprenons sans savoir où nous puisons cette force.

La dernière partie est sans doute la plus dure. C'est à coup de piolet que nous nous accrochons à la montagne pour grimper. Des rochers et de la glace corsent la difficulté. Le sommet est là devant nous à cinquante mètres. Mais que c'est dur ! Impossible de renoncer à présent.

Ca y est. A huit heures, nous y sommes. Nous sommes sur un toit du monde à 6 088 mètres !

Nous sommes tellement épuisés que c'est assis que nous admirons la terre qui s'étend à nos pieds. Le Lac Titicaca, La Paz, de nombreux sommets enneigés à plus de deux cents kilomètres de là.

Nous sommes heureux d'avoir réussi mais déjà inquiets de la redescente. Où allons nous trouver l'énergie ? Felix nous trouve la solution pour les deux cents premiers mètres de dénivelé, ce sera du rappel ! Il nous explique qu'il est plus dangereux de redescendre par le chemin emprunté lors de la montée qui est trop pierreux et glacé, nous ne discutons pas.

Il nous faudra une demi heure à bout de souffle pour descendre ces deux cents mètres de dénivellé et au moins vingt minutes pour nous en remettre.

Notre guide, Felix, lui, est toujours souriant et en pleine forme !

Nous repartons, Olive est en tête du trio, Felix en dernier. Nous découvrons alors les paysages que nous avons gravis cette nuit. Le chemin est bien tracé. Il contourne les nombreuses crevasses de la montagne. La descente nous apparaît tout aussi interminable que la montée même si nous souffrons moins. Notre ventre est toujours vide et nos batteries sont à plat.

Enfin à 11h30, nous rejoignons le refuge alto, ne comprenant toujours pas comment et pourquoi nous avons atteint le sommet du Huayna Potosi quelques heures plus tôt.


Un maté de coca et une barre de céréale plus loin, nous repartons avec nos quinze kilos sur le dos pour 1h20 de descente périlleuse en raison de l'enchevêtrement de pierres plus ou moins instables. Nous arrivons finalement au camp de base de la veille où nous attend pour notre plus grand bonheur la banquette du taxi.

Un seul objectif pour terminer cette incroyablement longue journée, une douche et un lit !

10 commentaires:

  1. Mais non c'était pas si dur...euh enfin si c'était carrement "chaud" si je puis dire... Nous aussi on en a jamais autant bavé, mais tellement content de l'avoir fait. Et puis à 4 c'est quand même plus sympa.
    Manu & Marie
    PS : vive le menu à 25 bol !!!!! et rdv pour le misti mais si mais si !!

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  2. Félicitations à vous deux. Quel courage ! Quelle victoire sur soi ! ça a l'air tellement dur mais tellement bien aussi. Encore bravo
    Bisous
    Steph

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  3. BRAVO !!!! Je salue votre courage et votre ténacité
    Martine C

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  4. Passionnant et poignant ce récit !
    Vous nous permettez de relativiser tant de choses ici...
    Merci !
    elsa

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  5. Vous êtes des dingues!!! mais ça on le savait déjà. On a hâte que vous rentriez les terrils c'est quand même plus sympas ;)))
    bisous et bravo
    Julie

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  6. Un pied devant l'autre.... cela va vous donner des ailes un truc pareil! Chapeau !!!
    bisous!!!!!!!!!!!!!!!!!!

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  7. Décidément, vous n'en finissez pas de nous émerveiller ! Quelles aventures formidables vous devez vivre ! Nous vous avions quitté lors de votre arrivée au Chili et vous nous avez encore fait rêver... Nous qui croyions que vous aviez fait le plus beau avec l'Australie, nous ne sommes pas décus d'avoir découvert l'amérique latine grâce à vos images et vos textes: on se croirait sur une autre planète. Nosu avons hate de vous revoir pour partager toutes ces aventures en live !
    Bonne fin de voyage !
    Amélie et Guillaume

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  8. Décidément Marie et Manu sont plus ractifs pour nous donner de vos nouvelles. Après l'histoire de votre ascension quelques jours avant votre récit, ils nous racontent déjà votre vertigineuse descente en VTT.
    Fatigués d'écrire les globe-trotters lillois ? :-)
    Quels dommage que vous vous quittiez, on va devoir attendre plus longtemps après les reportages dorénavant !

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  9. bonojur flo et olivier
    comment aller vous nous allon bien encore 1journee ecole et apres les vacances
    flo a recut vote carte postal
    adeline et en vacance deouis le 3juin elle et partis voir si elle a eut son bep
    et si elle et prise a l ecole
    kahina a fini son brever sa ete dur mais maintant on attend les resulta
    l annee prochaine elle et prise au lycee ferrer je suis pas contant car ses pas un bon lycee
    donc on va se renseigner pour savoir si elee peut aller ailleur
    bon je vous souhait une tres bonne journne
    a tres bientot christine
    ps"je vous direz si adeline a son brevet

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  10. Mais vous êtes fous? oh que oui...
    J'ose imaginer la difficulté de ce challenge, d'autant que j'admirais déja aupravant votre énergie permanente dans vos différents récis..
    En tous ca cela semble avoir été une des plus dures épreuves physiques de votre vie!! Bravo en tous cas
    gwenola

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